Les conseils de Serge Schall pour que notre jardin ne meure pas de chaud !
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5 questions à Serge Schall

pour un jardin qui ne meure pas de chaud !

Serge Schall jardine depuis une quarantaine d'années en région chaude, en bordure de Méditerranée. Si la chaleur et l’augmentation des températures, - +0,42°C en une dizaine d'années -, n’est pas vraiment une nouveauté pour lui, il constate que les pratiques et les méthodes du jardin méditerranéen sont en train de s’étendre aux cultures d’autres régions de France, phénomènes climatiques inédits obligent. Économies d’eau, plantes adaptées à la sécheresse et à la chaleur, ombrage du jardin, ce jardinier résilient nous transmet dans son livre Au secours, mon jardin crève de chaud ! les bonnes pratiques pour limiter les répercussions de ces changements macro-climatiques et les meilleures manières de réagir au jardin.

GARDENA – L’eau est la grande affaire du jardin, quelles sont, selon vous, les meilleures solutions pour arroser son jardin tout en préservant l’eau ?

Serge Schall - Il y a déjà une bonne nouvelle, c'est que l'eau est l’une des rares ressources naturelles qui soit recyclable à l'infini. Elle coule, s’évapore et retombe. Le souci est qu'elle ne retombe ni à l'endroit désiré, ni en quantité désirée, ni au moment désiré et c'est cela qu'il faut gérer. Hors changement climatique, certaines années, les précipitations dans le sud sont quasiment identiques voire supérieures à celles de la Bretagne ou de la région parisienne. La pluie tombe abondamment en hiver et ne donne plus une goutte en été, ce qui permet de constituer des réserves d’eau. Mais avec le changement climatique, ces grosses précipitations d’hiver ont disparu et les périodes sans une goutte d'eau s’étirent aujourd’hui jusqu’à 7 mois dans le sud. La gestion de l'eau au jardin est donc cruciale : il faut pouvoir la récupérer, la stocker et l’économiser. La récupération d’eau de pluie est possible mais elle a ses limites. En ville, on peut récupérer une eau fortement polluée et si ce n’est pas gênant pour le jardin d’ornement, cela l’est beaucoup plus pour le potager. Ensuite, lorsqu’il pleut beaucoup d'un coup, ce sont des centaines de litres d’eau par mètre carré de toiture que l’on peut récupérer, seulement il faut les stocker. Si on divise les 250, même 500 ou1 000 litres récupérés sous une gouttière par la capacité d'un arrosoir, ce n’est pas suffisant pour tenir plusieurs mois de chaleur et de sécheresse au jardin. La récupération d’eau est donc selon moi un complément aux deux extrémités de cette période. Il y a la possibilité d’enterrer de grosses cuves de 5 000 litres, mais c'est un grand chantier et un gros investissement.

e paillage présente de multiples avantages pour la gestion de l’eau au jardin.

© Photos Serge Schall

Le troisième point, c'est l’économie d'eau. Heureusement, on n’inonde plus les potagers comme il y a 20 ou 30 ans grâce aux systèmes d’arrosage goutte-à-goutte comme ceux de GARDENA ou aux tuyaux microporeux qui sont les meilleures solutions pour économiser l'eau. Doublé avec des pratiques comme le paillage, c’est très performant. Un bon paillage permet de tenir 10 jours sans arrosage : une fois la terre arrosée, il empêche la perte d’eau par évaporation et il crée aussi de la condensation grâce à son réseau de petits déchets qui accrochent l'hygrométrie. En pratique, tout convient pour un paillage du moment qu’il est végétal, on peut broyer les déchets verts par exemple et laisser ce broyat aux pieds des arbustes et des plantes. À l’exception des paillages décoratifs minéraux utilisés dans les régions très arides, on récupère tellement peu d'eau qu'il faut se poser la question de leur utilisation.

l’arrosage goutte-à-goutte est le plus efficace et économe en eau

GARDENA – Quelles sont les bonnes pratiques pour arroser efficacement ?

Serge Schall - Pour bien comprendre l'arrosage en pleine terre, il faut le comparer à celui des cultures en pots sur un balcon ou une terrasse. Dans la culture en pots, peu importe si on apporte un gros volume d'eau en une seule fois ou si on est en goutte-à-goutte, l’essentiel est de maintenir l'humidité sur toute la hauteur de la motte de la plante. Il faut procéder de la même manière au jardin. Si vous avez une profondeur utile de 30 ou 40 centimètres pour une plante potagère, il faut maintenir autant que possible une humidité constante sur cette hauteur utile. Connaître la nature de votre sol est donc déterminant pour savoir s’il retient ou laisse filer l’eau. Il faut également veiller à arroser au pied des plantes en ayant pris soin de créer une cuvette avant. Sauf pour les grands arbustes et les arbres car près du tronc ou de la souche, l'eau n'est pas absorbée car les racines sont déjà lignifiées et donc non perméables. Les racines et radicelles qui absorbent l'eau sont à l'aplomb de la frondaison de l’arbre. On arrosera donc un petit citronnier en boule à l'aplomb de la périphérie de la boule en ayant creusé une double cuvette pour mettre l’eau à cet aplomb et non au pied.

Enfin, il faut arroser le soir vers 21h, car le jardin profite de toute la fraîcheur de la nuit avant que ne se manifeste la première évaporation vers 10 ou 11 h heures du matin dans le sud. La meilleure solution d’arrosage est le goutte-à-goutte, associé à des pratiques anciennes. Dans le sud, il était courant de mettre des paillons pour ombrager les plantes fragiles des brûlures du soleil comme les salades, les tomates et les poivrons. C’étaient des structures faites de deux piquets sur lesquels on fixait des canisses que l’on déroulait vers 11h en matinée et que l’on repliait vers 18h pour laisser passer la lumière. Je pense que l’ombrière a de très beaux jours devant elle. Pour avoir travaillé en pépinière pendant 15 ans, il n’y avait que cette façon de protéger les plantes et de les garder en bon état.

Sous serre, les cultures sont abritées des rayons solaires trop mordants grâce aux ombrières

GARDENA - Comment protéger son jardin de la chaleur par des solutions naturelles ?

Serge Schall – Il y a l’ombrière donc, les paillons, les abris, les passages au blanc que l’on fait sur les petites serres de jardin ou les tunnels. Dans notre région où il est nécessaire de continuer à cultiver sous abri pendant l’été, il faut blanchir le revêtement et le nettoyer en septembre pour laisser passer la lumière. Mais j’ai observé que pour beaucoup de particuliers amateurs, la petite serre est destinée aux semis et bouturages avant la saison chaude ou à hiverner les plantes, et qu’elle reste vide tout l'été, donc c’est inutile de la passer au blanc. On peut aussi planter de grands arbres, en ayant en tête que cela prive de surfaces à cultiver. Quand on dispose d’un jardin aussi bien potager qu’ornemental ou d’agrément, il faut bien identifier ce que l’on attend de son jardin. De mon côté, j'ai fait le choix d'encourager l'existant lorsque j’ai acquis ma maison et de garder de grands arbres. Ils apportent beaucoup de fraicheur en été grâce à leur feuillage qu’ils perdent en hiver. C'est une bonne pratique, mais je ne peux pas prétendre avoir ni fleurs, ni légumes en dessous. Ce sont donc des choix.

Les agaves ou cycas sont des plantes adaptées à la sècheresse.

© Photos Serge Schall

GARDENA – Les plantes ont développé des stratégies pour lutter contre la chaleur et la sécheresse, quelles sont-elles ?

Serge Schall – En effet, les plantes ne nous ont pas attendus pour se protéger de la chaleur et de la sécheresse. Et la sélection naturelle fait que l’on a hérité des championnes ayant mis en place des stratégies différentes pour lutter contre la chaleur, les pertes d'eau par évaporation et évapotranspiration, les UV du soleil. On peut les identifier d'un simple coup d'œil grâce à différentes clés de reconnaissance, même lorsqu’on se trouve face à une plante qu’on ne connait pas. Premier point, pour éviter de perdre de l'eau, ce sont des plantes dont le feuillage est recouvert d'une cire épaisse, une cuticule qui imperméabilise le limbe. Il suffit de casser une feuille pour les identifier. Ensuite, ce sont les arbustes et plantes qui réduisent leur surface foliaire car moins de surface, c’est moins de transpiration et donc moins de perte en eau. Ce sont tous les arbres et arbustes à aiguilles ou feuilles allongées, réduites ou linéaires. Troisième stratégie, ce sont des plantes qui développent des poils et duvets abondants pour capter l'air ambiant, la rosée va se condenser par exemple dans ces poils. Il y a ensuite les plantes à feuillages argentés qui réfléchissent les rayons du soleil et qui reçoivent donc moins d’UV. Toutes ces plantes, arbustes et arbres combinent le plus souvent plusieurs adaptations pour mettre toutes les chances de leur côté, comme nos arbustes de garrigue, les cistes, filaires et autres lauriers-tins. Cinquième stratégie, ce sont toutes les plantes succulentes et plantes à caudex qui accumulent l’eau grâce à leurs feuillages épais, gorgés de sève comme les aloès et les agaves.

On trouve facilement des plantes de jardin sec

© Photos Serge Schall

Enfin, il y a toutes les plantes, vivaces ou non, qui disparaissent l'été, telles que l'acanthe, une plante typiquement adaptée à la chaleur. Parce qu'elle a un cycle inversé par rapport à nos plantes plus familières, elle perd complètement son feuillage en été et entre en dormance estivale. À ce moment-là, il ne faut surtout ni les arroser, ni les enrichir au risque de les faire pourrir. De nombreuses fougères ont aussi ce cycle, tout comme les plantes à bulbes, narcisses, tulipes etc. et tout le catalogue des plantes à bulbes des pays chauds et de l'hémisphère sud comme les ipheions et les triteleias. Enfin, toutes les plantes aromatiques de garrigue, les thyms, romarins, sarriette, origan s’adaptent en produisant des essences aromatiques. Le procédé est l’inverse de ce que l'on fait lorsque l’on sale les routes en hiver : on répand du sel de manière à abaisser le point de congélation de l'eau. Passée zéro degré, l'eau reste liquide. Produire des huiles essentielles va modifier le point d'évaporation de l’eau dans la plante. Quand le thermomètre va monter, il va rester une petite marge de sécurité pendant laquelle l’eau ne s'évapore pas. 

Le biocontrôle aide à réguler les rivalités entre espèces

GARDENA – Quel est l’incidence du réchauffement climatique sur nos pratiques sanitaires au jardin ?

Serge Schall – C’est ici que se situe le gros point d'interrogation. On sait qu’il va faire beaucoup plus chaud, on sait qu’il faut maîtriser l'arrosage. Ce que l’on sait moins, c’est l’incidence que le réchauffement va avoir sur les maladies, les champignons et surtout sur les insectes. Car c’est une règle quasi immuable : sitôt qu’il fait chaud il y a des insectes et sitôt qu'il ne fait pas assez froid l'hiver, il y a encore plus d'insectes, on l’a constaté encore cette année. Tous mes oliviers sont couverts de cochenilles parce qu’il n’a pas fait assez froid cet hiver, le grand ménage habituel n’a pas été fait. Donc l’inquiétude porte davantage sur cette partie sanitaire avec les insectes. Mais il se produit aussi des choses assez curieuses : il y a une vingtaine d’années, la cicadelle américaine s’est attaquée absolument à tous les arbustes, plantes et arbres, c’était la panique dans tous les jardins, chez les producteurs et les horticulteurs qui ne savaient pas comment s’en débarrasser. Et puis, elle a complétement disparu sans qu’on n’ait rien fait. J’ai recroisé un seul spécimen l’année dernière. Donc il y a des équilibres qui s’installent et la meilleure façon de les encourager, c’est de veiller à la biodiversité, de faire appel à des auxiliaires pour équilibrer les populations. C’est la base même de la lutte biologique. Le second point concernant la partie sanitaire est qu’il va falloir être plus pointu sur les traitements, notamment au potager. Il y a des années à mildiou, des années à insectes, mais il va falloir sans doute être plus régulier sur les traitements préventifs biologiques, aux argiles par exemple et agir avec des insecticides naturels à base d’huile de colza notamment, mais avec parcimonie car ils ne font pas de distinction entre les insectes. 

Livre Au secours mon jardin crève de chaud ! de Serge Schall, éditions Larousse.

A lire pour sauver son jardin de la canicule, "Au secours, mon jardin crève de chaud !" de Serge Schall, éditons Larousse 2024. 

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